samedi 28 mars 2015

Mahmoud Darwich, "Passeport", جَوازُ سَفَرٍ, Un poème, deux traductions



En 2008, Damas… capitale arabe de la culture. Pour la clôture, le chanteur libanais Marcel Khalife rend hommage au poète palestinien Mahmoud Darwich auteur du poème  "Passeport" : جَوازُ سَفَرٍ


ici dans une autre version chantée par le même :

 


لم يعرفوني في الظلال التي
تمتصّ لوني في جواز السفر
و كان جرحي عندهم معرضا
لسائح يعشق جمع الصور
لم يعرفوني، آه.. لا تتركي
كفي بلا شمس
لأن الشجر
يعرفني ..
تعرفني كل أغاني المطر
لا تتركيني شاحبا كالقمر !
كلّ العصافير التي لاحقت
كفي على باب المطار البعيد
كل حقول القمح ،
كل السجون،
كل القبور البيض
كل الحدود ،
كل المناديل التي لوّحت ،
كل العيون
كانت معي، لكنهم
قد أسقطوها من جواز السفر
عار من الاسم من الانتماء؟
في تربة ربيتها باليدين ؟
أيوب صاح اليوم ملء السماء:
لا تجعلوني عبرة مرتين !
يا سادتي! يا سادتي الأنبياء
لا تسألّوا الأشجار عن اسمها
لا تسألوا الوديان عن أمها
من جبهتي ينشق سيف الضياء
و من يدي ينبع ماء النهر
كل قلوب الناس ..جنسيتي
فلتسقطوا عني جوار السفر !


En voici deux traductions :

par Aymen Hacen :

Ils ne m'ont pas reconnu dans les ombres
qui absorbent ma couleur sur le passeport
et ma blessure leur était comme l'exposition
d'un touriste qui aime collectionner les photos.
Ah ! ils ne m'ont pas reconnu. Ne laisse pas le creux de ma main
sans soleil, parce que les arbres me connaissent
et tous les chants de pluie aussi,
ne me laisse pas pâle comme la lune !

Tous les oiseaux qui ont poursuivi le creux de ma main
jusqu'au seuil de l'aéroport lointain,
tous les champs de blé,
toutes les prisons,
toutes les tombes blanches,
toutes les frontières,
tous les mouchoirs agités,
tous les yeux,
tous étaient en ma compagnie,
mais ils ont été effacés du passeport.

Déchargé du poids du nom, de tout signe d'appartenance,
dans une terre que j'ai cultivée de mes mains ?
Job a crié aujourd'hui à pleine voix contre le ciel :
« Ne faites pas de moi, encore une fois, un exemple ! »
Messires, messires les Prophètes !
Ne demandez pas aux arbres leurs noms
ne demandez pas aux ruisseaux leurs sources,
c'est de mon front que naît l'épée de lumière
et de ma main point l'eau du fleuve.
Tous les cœurs des hommes sont ma nationalité,
alors débarrassez-moi de ce passeport !

par Luc-Willy Deheuvels (Manuel d'arabe moderne, vol. 2, L'Asiathèque, 2011, avec la collaboration de Marie-Claire Djaballah-Boulahbel) :

Ils ne m'ont pas reconnu dans les ombres qui
m'enlèvent toute couleur, sur mon passeport.
Ma blessure était pour eux curiosité exposée
par un touriste qui aime collectionner les photos.
Ils ne m'ont pas reconnu, ah… ne laisse pas
ma main sans soleil, parce que les arbres
me reconnaissent… et aussi toutes les chansons de pluie.
Ne m'abandonne pas, pâle comme la lune.

Tous les oiseaux qui ont suivi
ma main jusqu'à la porte du lointain aéroport,
tous les champs de blé,
toutes les prisons,
toutes les tombes blanches,
toutes les frontières,
tous les mouchoirs agités,
tous les regards
m'accompagnaient. Mais eux,
ils les ont enlevés de mon passeport.

Nu de tout nom, de toute appartenance,
sur un sol que j'ai cultivé de mes deux mains.
Job en ce jour a crié en plein ciel :
Ne faites pas de moi un exemple une deuxième fois !
Messieurs, messieurs le sprophètes,
ne demandez pas aux arbres leur nom,
n'interrogez pas les vallées sur leur mère.
De mon front surgit l'épée de lumière
et de ma main jaillit l'eau du fleuve.
Ma nationalité… c'est le cœur de tous les hommes.
retirez-moi donc mon passeport.

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